Junker Ju 88

La naissance

Le Ju 88 est le résultat d'une sélection parmi plusieurs modèles soumis à la RLM fin 1935 pour un Bombardier à vitesse moyenne.
Outre Junkers, Dornier, Henschel, Messerschmitt et plus tard Heinkel ont également participé à l'appel d'offres. La conception était basée sur un projet labellisé EF 59, qui devait être adapté aux exigences du RLM. Cette tâche a été confiée à deux ingénieurs américains qui avaient été recrutés par Fairchild, Alfred Gassner, originaire d'Autriche, et Heinrich Evers, un allemand avec une nationalité américaine.

L'aéronef est devenu un avion à aile centrale entièrement métallique avec un simple stabilisateur vertical et deux moteurs DB 600 B, puis fut remplacé par le Jumo 211 A nouvellement développé en interne à partir du troisième appareil. Toutes les versions avaient le radiateur en forme d'anneau devant le moteur, de sorte à donner l'impression qu'un moteur en étoile était installé.

Le 21 décembre 1936, la première version avec aux commande, le pilote Kindermann a pu décoller pour son premier vol. Les performances et les caractéristiques étaient très satisfaisantes, de sorte que bientôt on pourrait penser à établir des records de vitesse.

Le V3 avec son Jumo 211 était destiné aux records, mais il a échoué dans la première tentative d'enregistrement après une panne moteur en tentant d'atterrir à Nuremberg-Fürth.  Les deux membres d'équipage ont été tués.
Le V5 est maintenant prêt pour cette tâche. L'équipage composé d’Ernst Seibert et Dipl.-Ing. Kurt Heintz établit, le 19 mars 1939, deux records du monde de vitesse avec une charge utile de deux tonnes sur une distance de 1000 et 2000 km, respectivement à 517 et 501 km / h. Il y a eu un retard dans la production parce que le chef du bureau technique du RLM, Ernst Udet, avait demandé que l'avion soit désormais capable d'attaquer, ce qui a nécessité des modifications majeures.
Néanmoins, le Ju 88 est rapidement devenu un « multitalent ». Que ce soit pour des missions de bombardement en palier ou en piquer, que ce soit pour la reconnaissance à longue portée, pour le lancer de torpilles et enfin aussi pour la chasse de nuit,

Cependant, l'avion ne fut opérationnel au combat qu'au printemps 1940. Il se retrouva alors sur tous les théâtres de guerre jusqu'à la fin de la guerre. Les autres membres de l’Axe reçurent également des versions de Ju 88.
Il fut continuellement développé vers des performances plus élevées, même si son poids augmenta également.
Au total, environ 15 000 Ju 88 ont été construits.

Engagements

Le Ju 88 fut réellement engagé pour la première fois au combat en Norvège. Utilisé dans son rôle de bombardier en piqué, il contribua à endommager l'HMS Rodney et à couler l'HMS Gurkha le 9 avril 1940. Mais le KG 30 qui le déployait perdit 4 exemplaires lors de l'attaque.

Le Ju 88 fut engagé massivement lors de la Bataille de France. Il s'y montra efficace, que ce soit pour détruire des avions au sol ou des trains. Il coula aussi le paquebot RMS Lancastria près de St-Nazaire, provoquant la mort de 5800 personnes. Cependant, un fort taux d'accidents et de pertes au combat firent que les équipages avaient encore plus peur de leur avion que l'ennemi, au point de demander leur transfert dans une unité de He 111. Il est vrai que le Ju 88 était considéré à l'époque comme un appareil à haute performance. Il fallut d'une part ré-entraîner les pilotes, et d'autre part modifier la série A-1, au standard A-5.

Plus encore que le Do 17 et le He 111, le Ju 88 souffrit lors de la Bataille d'Angleterre, avec pas moins de 313 pertes. Des modifications sur le terrain eurent lieu afin de le rendre moins vulnérable, dont un blindage et des mitrailleuses supplémentaires. Le 27 septembre 1940, un équipage abattu récupéra les armes de bord et se battit contre des soldats britanniques lors de la bataille de Graveney Marsh : ce fut la dernière bataille sur le sol anglais contre des envahisseurs.

Il servit aussi au-dessus de l'Atlantique (version C-6), afin d'escorter les Fw 200 et de s'attaquer aux avions anti sous-marins. Ils y remporteront 109 victoires pour 117 pertes.

Lors de l'été 1941, le Ju 88 remplaça le Do 17. Avec le He 111, il devint le principal bombardier moyen de la Luftwaffe. Il se montra efficace lors de l'invasion de l'URSS dans la destruction de chars, de navires et d'avions au sol, mais subit 23 pertes dès le premier jour. Il dut aussi remplacer les Ju 87, trop peu nombreux à ce moment-là.

On le reverra lors de la bataille de Normandie, mais fut complètement surclassé par les appareils Alliés à ce moment-là. A partir de 1943, des équipages de Ju 88 feront défection vers la Grande-Bretagne.

La Finlande acheta 24 Ju 88A-4 en avril 1943, alors qu'elle était en guerre contre l'URSS. Un des raids les plus mémorables fut la contre-attaque au-dessus de Leningrad, alors que Tallin venait de subir un raid des VVS, le 9 mars 1944. Ils furent également utilisés pour des raids de reconnaissance et d'attaques de colonnes motorisées allemandes lorsque la Finlande se retourna contre l'Allemagne, en septembre 1944. La dernière mission de guerre intervint le 4 avril 1945. Ils furent utilisés pour l'entraînement jusqu'en 1948, puis ferraillés.

Il fut utilisé par la Bulgarie, l'Espagne (10 Ju 88A-4 achetés et 15 internés), la Hongrie (83 Ju 88A-4, 1 Ju 88C-6, 30 Ju 88D-1 de 1942 à 1945), la Regia Aeronautica (45 Ju 88A et 1 Ju 88D-1 en 1943), la Roumanie (40 Ju 88A-4 et 10 Ju 88D-1 de 1942 à 1953) pendant la guerre.
La RAF (au moins 5 exemplaires) et l'Union soviétique capturèrent des exemplaires, les évaluèrent et en opérèrent peut-être certains. Le Ju 88 influença fortement les Soviétiques, au point de vouloir faire du Tu-2 son équivalent.
Enfin, la France utilisa 22 Ju 88A-4 de 1944 à 1951, et 38 d'une autre version, au sein de l'armée de l'air comme de la Marine. Un Ju 88S-3 fut également utilisé. 5 exemplaires furent utilisés par la Marine, dont un Ju 88A-17 et 3 Ju 88A-14. Ils seront intégrés à la 10S et serviront à l'essai de torpilles. Ils connaîtront de gros problèmes de pannes mécaniques, aggravés par le manque de pièces détachées.

14 676 Ju 88 furent construits de 1936 à 1945, sans interruption et déclinés en 60 variantes (pour lesquelles on compte 104 prototypes). Il fut donc le bimoteur le plus produit de la Luftwaffe. Malgré des débuts et une mise au point difficile, il s'avéra un excellent appareil polyvalent, au point d'être comparé au Mosquito (il est vrai qu'ils ont été tous deux conçus comme bombardiers rapides). Cependant, il s'agissait aussi d'une machine complexe et difficile à piloter, qui souffrit de pertes.

Aujourd'hui, 2 appareils sont exposés, complets, l'un au musée de l'USAF à Dayton et l'autre au musée de la RAF. 3 autres exemplaires ont été restaurés.

Les variantes

• Ju 88 A-1 : Version initiale de série, dotée de moteurs Jumo 211B-1 de 1200 ch.
• Ju 88 A-2 : Version dotée de moteurs Jumo 211 G-1.
• Ju 88 A-3 : Version d'entraînement à doubles commandes.
• Ju 88 A-4 : Version améliorée à l'envergure accrue, avec le bout arrondi.
• Ju 88 A-5 : Ju 88A-1 portés au standard A-4.
• Ju 88 A-14 : Version dotée d'un coupe-câble.
• Ju 88 A-15 : Version dotée d'une soute allongée en bois.
• Ju 88 A-17 : Version emportant des torpilles pour la lutte anti-navires.
• Ju 88 B-0 : Version au nez entièrement vitré, 10 exemplaires de présérie. Donnera naissance au Ju 188.
• Ju 88 C-1 : Version prévue, dotée de moteurs BMW 801MA. Jamais construite.
• Ju 88 C-2 : Version au nez plein pour la chasse. Un canon MG FF et 3 mitrailleuses MG 17 dans le nez.
• Ju 88 C-4 : Version de chasse lourde et de reconnaissance.
• Ju 88 C-5 : Version améliorée de chasse lourde.
• Ju 88 C-6 : Version de chasse de nuit.
• Ju 88 C-7 : Les sous-variantes C7a et b servaient à l'interdiction. Le C7c était une variante de chasse lourde.
• Ju 88 D-1 : Version de reconnaissance photographique à long rayon d'action, basée sur le Ju 88 A-4.
• Ju 88 D-2 : Version de reconnaissance photographique à long rayon d'action, basée sur le Ju 88 A-5.
• Ju 88 D-3 : Version tropicalisée du Ju 88 D-1.
• Ju 88 D-4 : Version tropicalisée du Ju 88 D-2.
• Ju 88 G-1 : Version construite exprès pour la chasse de nuit, dotée de moteurs BMW 801 de 1700 ch et du radar FuG 220 Lichtenstein SN-2. Dépourvue de la nacelle ventrale "Bola".
• Ju 88 G-6 : Version de chasse de nuit dotée de moteurs Junkers Jumo 213A de 1750 ch, du radar FuG 220 Lichtenstein ou FuG 218 Neptun. 1 ou 2 canons Mg 15 disposés en oblique (70°) selon le système Schräge Musik.
• Ju 88 G-7 : Version de chasse de nuit dotée de moteurs Jumo 213E pour la haute altitude, et du radar FuG 240 Berlin. 15 exemplaires construits avant la victoire.
• Ju 88 H-1 : Version de patrouille maritime et de reconnaissance basée sur le Ju 88G.
• Ju 88 H-2 : Version de chasse.
• Ju 88 H-3 : Version de patrouille maritime et de reconnaissance basée sur le Ju 88G.
• Ju 88 H-4 : Version de chasse.
• Ju 88 P-1 : Version dotée d'un canon BK 75 de 75 mm dans une nacelle ventrale. Apparue à la mi-1942. 40 exemplaires.
• Ju 88 P-2 : Version dotée de deux canons BK 37 de 37 mm en nacelle ventrale.
• Ju 88 P-3 : Similaire au P-2, avec du blindage additionnel.
• Ju 88 P-4 : Version dotée d'un canon BK 5 de 50 mm en nacelle ventrale, 32 exemplaires construits.
• Ju 88 P-5 : Version dotée d'un canon de 88 mm.
• Ju 88 R-1 : Ju 88 C-6b de chasse de nuit, doté de moteurs BMW 801L de 1560 ch.
• Ju 88 R-2 : Ju 88 C-6b doté de moteurs BMW 801 G-2 de 1700 ch.

Caractéristique technique générale

Longueur :	15,50 m
Envergure :	20,08 m
Hauteur :	5,07 m
Équipage :	4 personnes (1 pilotes, un bomber/mitrailleurs, deux mitrailleurs)
Moteur:	DB 600, BMW 801, Jumo 211, Jumo 213
Puissance :	de 1200 cv à 1700 cv
Vmax:	550 km/h
Rayon d'action :	2 500 km
Plafond pratique :	9 900 m
Rôle :	Multi-rôles
Armement :	Bombardier : - 500 kg en interne - 4 supports sous les ailes pour 3 000 kg Chasse : - 4 canons MG 151/20 de 20 mm - 1 ou 2 canons MG 151/20 de 20 mm Schräge Musik (orienté(s) à 60° vers le haut) Zerstörer : 1 canons de 37, 50 ou 75 mm